Afin de légitimer Laurent Gbagbo/Le président Tia Koné veut casser tous les décrets signés par le président Ouattara//Les mesures urgentes prises avant le 14 février
Publié le samedi 5 février 2011 | Le Nouveau Réveil - Et revoilà Tia Koné. Le célébrissime président de la Cour suprême ivoirienne a décidé de rentrer en scène dans la crise post-électorale
Publié le samedi 5 février 2011 | Le Nouveau Réveil - Et revoilà Tia Koné. Le célébrissime président de la Cour suprême ivoirienne a décidé de rentrer en scène dans la crise post-électorale
qui secoue la Côte d'Ivoire depuis plus de deux mois. Avec des "explosifs juridiques" qu'il est en train de concocter avec minutie, Tia Koné espère faire voler en éclat toutes les décisions, mesures ou décrets pris par le président élu, Alassane Ouattara, afin de restaurer la démocratie et l'Etat de droit.
Le 14 février 2010 est la date choisie par le très controversé président de la Cour suprême pour signer son retour. Mais avant, il ne s'est point embarrassé de fioritures juridiques pour arrêter quelques mesures urgentes.
C'est connu. Ce qui frappe chez Tia Koné, c'est son aisance singulière à tordre le cou au droit pour arriver à ses fins. Ce qui a fait dire, il y a quelques années, à un politologue que ce haut magistrat n'est pas un serviteur du droit mais qu'il se sert du droit et parfois même de ce que ne dit pas le droit pour avancer.
Revenons aux faits.
A l'instar de nombreuses entreprises publiques ou parapubliques et de certaines sociétés privées au centre de la terrible bataille entre le président élu et le président sortant pour le contrôle de l'Etat, la société d'exploitation pétrolière, Petroci Holding que gérait Kassoum Fadiga, gendre de M. Gbagbo, a vu ses comptes saisis et ses organes dirigeants remaniés par décisions du président Alassane Ouattara.
Ainsi, par décret n°2010-0021 du 15 décembre 2010, le président élu nommait de nombreux administrateurs. Par deux autres décrets pris le 17 décembre 2010, il nommait un nouveau Pca et un directeur général intérimaire. La conséquence immédiate est que les anciens dirigeants de l'entreprise nommés par Gbagbo qui ne peuvent plus effectuer un certain nombre d'opérations, notamment bancaires et transactions au nom de Petroci, saisissent leur conseil pour attaquer les décisions du président Ouattara en justice. La voie choisie est le recours pour excès de pouvoir. Et c'est à partir de là que l'affaire devient intéressante.
Acrobaties juridiques
Normalement le recours pour excès de pouvoir est subordonné à un recours administratif préalable. Qui est le recours gracieux ou le recours hiérarchique. Plus simplement cela veut dire que celui qui veut attaquer une décision pour excès de pouvoir doit exercer un recours préalable auprès de l'autorité qui a pris la décision soit auprès du supérieur hiérarchique de celle-ci. Il s'en suit que les responsables de la Petroci devraient contester les décisions qui les révoquent auprès de l'autorité qui en est l'auteur c'est-à-dire le président légitime Alassane Ouatatra. Mais au lieu de cela, Me Takoré et ses amis empruntent un autre chemin. Le recours administratif préalable est introduit auprès de M. Laurent Gbagbo qui n'est pourtant pas l'auteur des décisions attaquées encore moins le supérieur hiérarchique de M. Ouattara. En dépit de ce vice congénital dont est marqué l'acte, M. Tia Koné décide de recevoir la plainte pour recours pour excès de pouvoir introduite par les anciens dirigeants de la Petroci.
Mieux, en attendant l'audience qu'il a convoquée le 14 février entre l'Etat de Côte d'Ivoire et Petroci, le président de la Cour suprême rend une ordonnance qui autorise Petroci à assigner en référé et surtout qui ordonne le sursis à l'exécution des trois décrets pris par le président Ouattara.
Tia Koné dans le faux
C'est un slalom géant dans l'antre du faux. Prétendument fondé sur l'article 221 du code de procédure pénale, l'intrusion de Tia Koné dans la procédure de recours pour excès de pouvoir est une violation de la loi, le président de la Cour suprême étant totalement incompétent pour agir. En effet, les articles 76 et 79 de la loi sur la Cour suprême donne clairement compétence soit à la Chambre administrative de la Cour suprême pour ordonner, sous certaines conditions, le sursis à l'exécution d'une décision déférée à cette Chambre, soit au président de ladite Chambre pour ordonner toutes mesures utiles, sans toutefois, faire obstacle à l'exécution d'une décision administrative.
De là suit que seule la Chambre administrative de la Cour suprême aurait pu valablement prendre la mesure du sursis à exécution des trois décrets querellés. A supposer même que le président de la Cour suprême fut compétent pour ordonner le sursis à l'exécution d'un décret, la décision prise par Tia Koné ne serait pas conforme à la loi. Et pour cause, la mesure de sursis suppose un recours en annulation pendant devant la Chambre administrative, le sursis apparaissant alors comme une mesure provisoire, prise en attendant la mesure définitive sur le recours en annulation. Or, dans le cas d'espèce, la Chambre administrative n'a pas été saisie d'un tel recours en annulation. La demande de sursis n'est donc pas juridiquement recevable. Tia Koné est dans le faux. Et comme en 2000, il veut encore prendre date avec l'histoire de la Côte d'Ivoire. Réussira-t-il ?
Akwaba Saint Clair