Scandale/Législatives: Roxana Maracineanu appelle à un «front républicain» contre Rachel Keke, la gauche s’indigne

Par Liberation - Législatives Roxana Maracineanu appelle à un «front républicain» contre Rachel Keke, la gauche s’indigne.

Rachel Keke est arrivée en tête de l'élection législative dans le Val-de-Marne dimanche. (Mathieu ZAZZO/pour Libération).

«Barrage» et «front républicain». Voilà des mots qu’on pensait réservés à la lutte contre l’extrême droite. A chaque fois que le Front national, aujourd’hui Rassemblement national (RN), se qualifie au second tour d’une élection, droite et gauche s’accordent pour lui barrer la route. Oui mais ça, c’était avant. Les macronistes ont désormais inventé le «front républicain» contre ce qu’ils appellent «l’extrême gauche». Rachel Keke, femme de chambre franco-ivoirienne, qui a mené une lutte victorieuse de vingt-deux mois avec ses collègues de l’hôtel Ibis Batignolles pour réclamer de meilleures conditions de travail, en fait les frais à ses dépens. Qualifiée pour le second tour, avec 37,22 % des voix, la candidate de la gauche unie affrontera dimanche l’ancienne ministre des Sports Roxana Maracineanu (LREM), arrivée en deuxième position avec 23,77 %. Un écart important qui inquiète la macronie.

Invitée sur France Info lundi matin, Roxana Maracineanu enjoint «toutes les personnes qui n’ont pas voté pour Rachel Keke» à la rejoindre dans son «front républicain». Des propos qui ont de quoi étonner. Rappelons que cette digue existe afin d’installer un cordon sanitaire autour de partis ou de candidats qui s’inscrivent en dehors du champ républicain. Ou qui, du moins, représenteraient une menace pour la République. Plus tard dans la matinée, l’ex-championne de natation en a remis une couche. «J’ai toujours combattu les extrêmes. J’appelle donc tous ceux qui ne veulent pas de la gauche radicale à me rejoindre», a-t-elle lâché, renvoyant dos à dos «les extrêmes» sans distinction. Une stratégie très prisée de la macronie, qui ne retient pas ses coups depuis plusieurs jours contre la Nupes.
«Une faute politique impardonnable» pour David Cormand

La gauche, très remontée contre les propos de Roxana Maracineanu, monte au créneau. «La ministre déchue se vautre dans l’indignité en appelant à faire “barrage” à Rachel Keke», estime Mathilde Panot, candidate LFI dans le Val-de-Marne et présidente du groupe insoumis à l’Assemblée. Elle se dit au contraire «fière» d’envoyer «à l’Assemblée la première femme de chambre de l’histoire». D’une seule voix, écologistes, communistes et socialistes lui ont emboîté le pas. L’eurodéputé EE-LV David Cormand se veut particulièrement virulent. «Dépourvus de tous repères, les candidats LREM s’égarent dans des eaux saumâtres. En n’appelant pas à battre le RN tout en revendiquant un front républicain contre la Nupes, ils banalisent l’extrême droite», dit-il. Avant de fustiger un «pacte faustien» qui, aux yeux de Cormand, constitue «une faute politique impardonnable».

Ian Brossat, adjoint PCF à la mairie de Paris, dézingue : «Ces gens sont pathétiques.» Cette séquence intervient, selon lui, après que la majorité a «vanté les valeurs communes avec la gauche entre les deux tours de la présidentielle». Les propos de l’ex-ministre ne passent pas non plus pour François Ruffin. Le député et candidat de la Nupes, arrivé en tête au premier tour avec plus de 40 % des voix dans la Somme, s’emporte : «Quand les Rachel Keke du pays nettoient les chiottes de vos chambres d’hôtels, là vous n’appelez pas au front républicain.»

par Marceau Taburet