François Adé Mensah (Secrétaire général de l`Ugtci) : “L`Ugtci ne soutient pas Gbagbo”

Le 20 novembre 2010 par le Nouveau Réveil - Le Secrétaire général de l`Union générale des travailleurs de Côte d`Ivoire (Ugtci), la plus importante des trois centrales syndicales

qui auraient exprimé publiquement leur soutien au candidat LMP Laurent Gbagbo, est très en colère. Suite à la rencontre de mercredi dernier, il trouve inacceptable et malhonnête les intentions qu`on lui prêtre. Dans cet entretien, Adé Mensah fait la mise au point suivante : il n`a jamais déclaré soutenir le candidat Gbagbo.

Le candidat Gbagbo au cours d'une conférence de presse à son QG de campagne à Cocody.

Le 20 novembre 2010 par le Nouveau Réveil - Le Secrétaire général de l`Union générale des travailleurs de Côte d`Ivoire (Ugtci), la plus importante des trois centrales syndicales

qui auraient exprimé publiquement leur soutien au candidat LMP Laurent Gbagbo, est très en colère. Suite à la rencontre de mercredi dernier, il trouve inacceptable et malhonnête les intentions qu`on lui prêtre. Dans cet entretien, Adé Mensah fait la mise au point suivante : il n`a jamais déclaré soutenir le candidat Gbagbo.

Monsieur le Secrétaire général de l`Ugtci, au cours d`une rencontre publique mercredi dernier au palais de la Culture de Treichville, vous avec deux autres centrales syndicales la Fesaci et Dignité, avez exprimé solennellement le soutien des travailleurs de Côte d`Ivoire à la candidature de Laurent Gbagbo. Pouvez-vous nous expliquer les conditions et les motivations d`un tel soutien ?
Ce qu`il convient de dire, c`est que j`ai répondu à une invitation dans le cadre d`une cérémonie prévue au Palais de la Culture avec le chef de l`Etat. Cette invitation, je l`ai reçue mardi tard dans la soirée et le lendemain matin, je me suis rendu au bureau où des collaborateurs m`ont informé qu`en fait, le chef de l`Etat désirait rencontrer les syndicalistes.
En tant que premier responsable syndical, je ne pouvais pas ne pas répondre à une telle invitation. Donc je m`y suis rendu même si je n`avais pas eu le temps d`informer les travailleurs de la démarche du chef de l`Etat. De là à dire que je suis allé exprimer un soutien à un candidat, c`est un peu vite aller en besogne. Je dois vous rappeler que je suis un responsable, je sais ce que je peux faire, je sais ce que je ne peux pas faire et je sais comment je dois faire. Je suis un syndicaliste, pas un parti politique. Un parti politique est une famille qui lutte pour la conquête du pouvoir. Son responsable prend des décisions ou des positions dans ce sens. Un syndicaliste lutte pour l`amélioration des conditions de travail de ses camarades. Dans une centrale syndicale comme l`Ugtci, toutes les sensibilités politiques sont représentées. Pdci, Rdr, Fpi, Udpci, Pit…, on a tout le monde à l`Ugtci. Je ne peux me permettre tout seul d`engager l`Ugtci derrière un candidat. Je ne peux diriger l`Ugtci pour ou contre quelqu`un. Je ne peux le faire et je ne l`ai jamais fait. Chacun à l`Ugtci en fonction de ses opinions peut soutenir tel ou tel candidat. Mais nous ne pouvons embarquer tout le monde dans une direction. Si l`Ugtci décide d`aller dans un sens, c`est que tout le monde est d`accord. Dans le cas d`espèce-ce n`est pas le cas.
Il est vrai qu`après l`intervention du chef de l`Etat, on m`a invité à prendre la parole. J`ai alors déclaré que je me réjouissais d`avoir l`occasion de rencontrer le chef de l`Etat avec qui l`Ugtci souhaitait échanger comme nous l`avons fait avec les autres candidats. Son épouse est passée nous entretenir à l`Ugtci. Le professeur Francis Wodié du Pit est venu, nous l`avons reçu. M. Anaky Kobénan du Mfa est venu nous parler, nous l`avons reçu. Mme Oble, le Premier ministre Alassane Ouattara ont échangé avec nous avant le 1er tour.

Il n`y a pas eu de soutien les concernant ?
Non, il ne s`agit pas de cela. Des personnalités veulent diriger la Côte d`Ivoire. Ils sollicitent par conséquent des rencontres avec les travailleurs pour leur exprimer leur vision, leur politique, leur projet pour les travailleurs s`ils arrivent au pouvoir. C`est au vu des exposés que les uns et les autres décident de soutenir tel ou tel. Mais moi, secrétaire général, je ne peux pas m`ériger en chef de parti politique pour déverser les voix de tous les travailleurs sur un candidat. Ce n`est pas possible.

Au cours de cette rencontre de mercredi, l`orientation des discours vous a-t-il surpris ou géné ?
J`ai été dans un premier temps surpris. Les camarades des autres centrales ont égrené un certain nombre de chose. Même le chef de l`Etat a parlé de Hiré et Lamé et aussi de Carena, ce sont des travailleurs de Dignité. J`apprécie.
Mais je crois avouer qu`en tant que responsable de l`Ugtci j`ai été géné par ce qu`on a tenté de nous faire dire ou endosser.

Comment les choses se sont-elles passées concrètement ? Puisqu`on vous a vu adresser un discours au cours de ladite cérémonie ?
C`était une affaire apparemment bien organisée. Puisque le matin de la cérémonie, j`ai lu dans un journal qu`une organisation avait été mise en place. Dignité et Fesaci étaient dans ce comité. Moi en tant que Ugtci, je n`y étais pas. Donc, lorsque j`ai été convié à la dernière minute, c`est par respect pour l`autorité du chef de l`Etat que je suis allé sans poser de préalable. Et quand le chef de l`Etat a fini de parler, on dit, bon les centrales vont parler. Et comme par hasard, j`ai été le premier à être appelé à la tribune. Je me suis contenté de dire que je me réjouissais de ce que le chef de l`Etat ait décidé de présenter son projet aux travailleurs. Et puis, j`ai laissé le soin à notre porte parole de présenter nos préoccupations. Ce que nous avons pu rassembler. Il ne nous a pas été demandé d`apporter un soutien quelconque. Et comme je l`ai dit, je n`ai pas qualité pour diriger nos camarades dans le sens du soutien à un candidat. Si je le fais, je risque d`avoir à gérer des problèmes en interne. Et je ne l`ai pas fait. L`Ugtci ne l`a pas fait.

Donc contrairement à ce qu`on a lu dans une partie de la presse nationale, l`Ugtci n`a pas exprimé un soutien au candidat Gbagbo ?
Point du tout ! Je n`ai fait de déclaration de soutien à un candidat au nom de l`Ugtci.

Avez-vous le sentiment d`avoir été piégé ?
Je n`ai pas le sentiment d`avoir été piégé. J`affirme que j`ai été piégé mais là encore, je l`assume. Parce que je ne pouvais pas ne pas répondre à une invitation du chef de l`Etat.

Dans le cadre de la présente campagne, quelle est la position de l`Ugtci ?
La position de l`Ugtci est commune. Nous avons mené une campagne pour la sortie de crise. Nous étions à Linas Marcoussis lors des premières négociations. Nous sommes intervenus auprès de nos camarades syndicalistes en France pour leur demander de nous aider à résoudre le problème. Même pour la bataille du PPTE, nous nous sommes rendus en France pour apporter notre contribution à l`Etat. L`Ugtci, a soutenu toutes les actions en faveur de la sortir de crise.
Mais je dis que le mari de ma mère est mon père. Nous sommes des travailleurs et nous aurons à négocier avec le chef de l`Etat qui sortira des urnes. Donc d`avance, je ne peux récuser officiellement un candidat pour un autre. Si demain mon choix ne passe pas, qu`est-ce que je fais avec celui que j`ai combattu ?

Quel message à l`ensemble des travailleurs relevant de l`Ugtci ?
Aux travailleurs de l`Ugtci je dirai ceci : nous avons eu la visite de plusieurs candidats. Chacun a eu à nous livrer son programme de société. Il appartient à chacun en toute connaissance de cause et en toute liberté de choisir le candidat qui lui sied le mieux. Celui qui sera élu sera votre interlocuteur à tous demain.
Interview réalisée par Akwaba Saint Clair