Après les révélations de Mediapart: Rien ne va plus à la cour pénale internationale !

Par IvoireBusiness - Après les révélations de Mediapart, rien ne va plus à la cour pénale internationale !

Après les révélations de Mediapart, rien ne va plus à la cour pénale internationale !

« Il y a deux sortes de justice : vous avez l’avocat qui connait bien la loi, et l’avocat qui connait bien le juge » (Coluche). Et, pourtant Coluche ne connaissait pas encore le premier procureur de la Cour pénale internationale, l’argentin Luis Moreno Ocampo qui défraie aujourd’hui la chronique des faits divers crapuleux. À jet continu, le feuilleton des turpitudes du magistrat déverse chaque jour un nouvel épisode, encore plus sordide que le précédent, et cela depuis le 30 septembre 2017. Cette enquête intitulée Les secrets de la Cour est le fruit de six mois d’investigation menée par huit médias internationaux membres de l’« European Investigate Collaborations » (EIC comprenant Mediapart, Der Spiegel, NRC Handelsblad, The Sunday Times, El Mundo, Le Soir, ANCIR et The Black Sea).

Incroyable mais vrai pourrait être le titre de cette saga judicaire. Présentée hier comme un parangon de vertu1, la CPI y apparaît aujourd’hui sous un jour plus contrasté. C’est le moins que l’on puisse dire !

Des signaux faibles inquiétants parvenaient déjà aux oreilles sensibles et réalistes des Cassandre depuis de longs mois en provenance d’une petite ville aux Pays-Bas, La Haye2. L’affaire Laurent Gbagbo apparaissait déjà comme révélatrice d’une justice internationale qui n’est ni indépendante, ni impartiale. Ce qui est le moins que l’on puisse attendre d’une juridiction internationale de ce niveau. Il importe de revenir à la genèse de la création de la Cour et à ses limites objectives avant d’étudier les dérives d’une structure aux prises avec certains de ses démons. Enfin, la CPI n’aurait-elle pas été instrumentalisée par la France dans l’affaire ivoirienne au mépris des valeurs dont elle entend être le porte-parole ?

LA COUR CONFRONTÉE À SES LIMITES

Si la création de la Cour pénale internationale à Rome est de bon augure en tant qu’espoir d’une société internationale régulée, elle n’en comporte pas moins des limites tenant au principe de réalité.

La promesse de Rome : le rêve devient réalité

« Ce passage de l’état de nature à l’état civil produit dans l’homme un changement très remarquable, en substituant dans sa conduite la justice à l’instinct » nous rappelle Jean-Jacques Rousseau en 1856. Il faut attendre l’année 2002 pour que soit créée la cour pénale internationale (CPI) à Rome par un traité signé par 120 États. Elle constitue une structuration importante de la communauté internationale autour de la notion de respect des droits de l’homme et de sanction de ses éventuelles violations par une juridiction internationale indépendante et impartiale. Il n’existe pas de paix sans justice3. Impatients d’appréhender cette révolution copernicienne de la justice internationale, les experts s’emparent du sujet pour en faire une exégèse complète article par article4. En termes d’approche du droit positif, le résultat est particulièrement impressionnant. Comme le souligne le professeur Serge Sur, la nouvelle juridiction internationale, qui est porteuse d’un dessein historique, s’inscrit durablement et de manière irréversible dans le paysage du droit international même si elle n’est qu’une étape, un moment dans un processus de longue haleine. Fait impensable, il y a encore quelques années, les auteurs de crimes les plus odieux, et en dépit de leur qualité (chefs d’Etats, par exemple), pourront être poursuivis, jugés, voire condamnés. Fini le temps de l’indifférence de la communauté internationale face à ses démons !

La normalité de La Haye : la réalité a ses limites

« L’histoire et le sens du progrès ne marchent toujours pas dans le même sens pour tous »5. A l’expérience, on s’aperçoit rapidement que la Cour pénale internationale atteint rapidement ses limites en raison de sa « compétence limitée et de ses résultats mitigés »6. A l’instar de la Société des nations (SDN), elle pèche par trois insuffisances : absence d’universalité (l’absence de participation de la Chine, de l’Inde, du Pakistan, d’Israël, de la Russie et, surtout des États-Unis constitue un sérieux handicap), flou de l’incrimination (le concept d’atteintes graves au droit humanitaire manque de clarté) et absence de puissance coercitive (elle suppose un minimum de coopération des États, quid des États faillis ?, quid du président soudanais ?7…) contribuent à affaiblir la puissance supposée de la Cour8. Ce fameux état de droit dont se gargarisent nos bonnes consciences n’est en qu’à ses premiers balbutiements à La Haye. Souvenons-nous que « quand il n’y a pas de bonnes solutions aux problèmes, alors les démons se réveillent » !9 Le principe de réalité rattrape la justice internationale10. La plus grave critique provient de ceux qui accusent la Cour d’être soumise aux pressions de certains Etats qui l’utiliseraient ou l’instrumentaliseraient à des fins politiques éloignées du seul impératif de justice qui est sa raison d’être11 alors même que de nombreuses personnes incriminables vivent aujourd’hui encore dans l’impunité la plus totale. Tel n’est pas le moindre des paradoxes d’une justice internationale à vocation universelle en théorie mais dont l’universalité n’est que théorique dans la pratique.

Comme toute justice, la justice pénale est avant tout une justice rendue par des hommes et des femmes et non par des robots, ce qui la rend faillible.

LA COUR AUX PRISES AVEC SES DÉMONS

Les révélations incontestables de l’enquête conduite par un collectif de médias internationaux sonnent comme un coup de tonnerre dans le ciel de la capitale des Pays-Bas. Elles conduisent l’actuel procureur de la Cour à actionner toutes sortes de paratonnerres.

Le coup de tonnerre : Les facéties du procureur Ocampo

Sur la base d’une fuite de 40 000 documents officiels obtenus par l’« European Investigate Collaborations », une série de dysfonctionnements majeurs au sein de la CPI est révélés, pour la plupart en relation avec les dérives de son premier procureur, l’argentin Luis Moreno Ocampo (2003-2012). La liste des turpitudes que nous allons présenter n’est malheureusement pas exhaustive. Citons les pêle-mêle : (1) pendant qu’il traquait les plus grands criminels de la planète, le premier procureur de la Cour pénale internationale (CPI), l’argentin Luis Moreno Ocampo, a détenu des sociétés offshore implantées au Panama et dans les îles Vierges britanniques, deux des plus opaques paradis fiscaux au monde et cela en violation des statuts de la Cour qui interdisent aux procureurs d’avoir une autre activité professionnelle et alors même que l’argentin s’était bâti dans le passé une solide réputation de militant anticorruption12 ; (2) le procureur aurait défendu les intérêts d’un homme d’affaires milliardaire, soutien de potentiels criminels de guerre en relation avec la chute du colonel Kadhafi en Libye13 ; (3) après avoir quitté la Cour en 2012, le procureur rejoint un cabinet new-yorkais à l’occasion duquel il s’ingère dans les affaires de la CPI pour obtenir la levée des charges de crime contre l’humanité qu’il avait lui-même initiés contre le président kényan14 ; (4) implication active dans le dossier des Yézidis pour le compte d’une banque d’investissement de New-York15 ; (5) la duplicité du procureur Ocampo sur le dossier kényan qui conduit à un véritable déni de justice16 ; (6) Angelina Jolie, George Clooney, Pierre Omidyar – fondateur d’eBay –, le Qatar toujours lui dès qu’il y a un mauvais coup… Au cours de son mandat, le premier procureur de la Cour pénale internationale, Luis Moreno Ocampo, a laissé Hollywood, la Silicon Valley et certains États utiliser la CPI pour nourrir leur propre vision du monde. Au risque de gager l’indépendance de la Cour17… plus d’autres révélations qui pourraient parvenir dans les semaines à venir… et mettre encore plus en question la crédibilité de la Cour pénale internationale et sa légitimité dans la poursuite des criminels de haut vol sur une base non discriminatoire.

Le paratonnerre : le désarroi de l’institution

Les révélations sur la CPI affaiblissent une institution déjà très critiquée. Mais le directeur de l’ONG Human Rights Watch, Ken Roth, continue, contre vents et marée, de défendre « le seul outil » à même d’empêcher une impunité totale. L’ONG américaine de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) fait partie des principales associations, qui ont poussé à la création de la Cour pénale internationale (CPI), et qui continue de soutenir l’exigence d’une justice internationale servant à dissuader les autocrates et autres chefs de guerre de massacrer leurs populations, et à punir ceux qui ont commis des crimes18. Tout ceci est bien bon mais ne parvient pas à effacer le discrédit qui pèse sur l’institution en tant que telle. Désormais, l’affaire est prise au sérieux à La Haye. Le 6 octobre 2017, le bureau de la procureure, Fatou Bensouda annonce l’ouverture d’une enquête interne, chargeant au passage son prédécesseur. D’ores et déjà, une porte-parole est suspendue, soupçonnée d’avoir travaillé sous fausse identité en 2015 pour un cabinet d’avocats new-yorkais afin de pousser la cause des Yézidis, une minorité confessionnelle attaquée par l’EIIL en Irak19. D’autres mesures seraient prises dans les semaines à venir. Fait plus grave encore, la France de Nicolas Sarkozy fait désormais l’objet de toutes les attentions pour ses ingérences en Côte d’ivoire mais aussi sur le fonctionnement normal de la CPI.

C’est aujourd’hui du continent africain que les plus gros nuages s’amoncellent sur l’avenir de la Cour pénale internationale (retraits en cascade), nuages qui atteignent la France.

3ème PARTIE : LA COUR VICTIME DE LA FRANCE ?

Pour prendre toute la mesure des révélations consternantes concernant l’affaire Gbagbo, il convient de se replacer dans le contexte du quinquennat de Nicolas Sarkozy à l’époque du début des mal nommés « printemps arabes ». À trop tirer sur la corde, la France pourrait rendre des comptes à la Haye.

Le changement de régime : un marqueur de la Sarkozie à son apogée

Souvenons-nous des conditions dans lesquelles le président de la République, Nicolas Sarkozy est conduit, par une interprétation extensive des termes de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU du 17 mars 2011 (en particulier le membre de phrase : « à prendre toutes les mesures nécessaires »)20, à contribuer activement à faire la guerre contre les troupes gouvernementales mais aussi à prêter main forte à l’élimination du colonel Kadhafi alors même qu’il aurait été plus sage de le traduire devant la Cour pénale internationale ! En un mot à faire du changement de régime l’alpha et l’oméga de sa politique étrangère. Un grand principe du droit veut qu’on ne se fasse pas justice soi-même surtout dans la patrie autoproclamée des droits de l’homme !

Que dire de la manière peu diplomatique et peu orthodoxe dont la France est intervenue en Côte d’Ivoire sous mandat de la résolution 1975 du 5 avril 201121 pour chasser manu militari le président Laurent Gbagbo du Golf Hôtel à Abidjan afin de le remplacer par Alassane Ouattara, proche de Nicolas Sarkozy ? Pour se rendre exactement compte de la brutalité de l’intervention militaire française commandée directement depuis l’Élysée – il n’est pas ici question de mettre en cause nos militaires qui n’ont fait qu’obéir aux ordres du pouvoir politique -, il suffit de se reporter à la description très détaillée qu’en livre l’ambassadeur de France à Abidjan dans ses Mémoires parue en 201622. Deux citations de cet ouvrage méritent d’être retenues.

La première est ainsi libellée : « Au plus fort de l’action et alors que des décisions doivent être prises, il arrivera que Jean-David Levitte, Nicolas Sarkozy, Alassane Ouattara et moi-même nous retrouvions ensemble au téléphone de manière croisée et simultanée, ce qui permettra de formuler en quelques minutes questions et réponses. Levitte me fera alors remarquer :’ça va plus vite que par télégramme !’ »… et pour les connaisseurs on pourrait rajouter ça ne laisse pas de traces écrites.

La seconde se lit ainsi : « Je réponds généralement à des questions particulières de Stéphane Gompertz qui se montre très concerné par le sort de nos compatriotes ». Stéphane Gompertz, brillant diplomate ancien élève de l’École normale supérieure et de l’École nationale d’administration qui a été ambassadeur en Éthiopie et en Autriche, est alors directeur d’Afrique et de l’Océan indien (DAOI) au Quai d’Orsay. Au moment de la crise ivoirienne, il suit la situation dans le pays heure par heure en étroite coopération avec le cabinet du ministre, Michèle Alliot-Marie puis Alain Juppé, avec le conseiller diplomatique de l’Élysée, Jean-David Levitte et le conseiller Afrique, André Parant (actuel secrétaire général adjoint du Quai d’Orsay). C’est donc un homme parfaitement au fait du déroulement des opérations ayant conduit à la mise à l’écart de Laurent Gbagbo le 11 avril 2017 grâce à la présence de chars français et au bombardement de l’hôtel du Golf par des hélicoptères français.

Dans la foulée de ses exploits ivoiriens, Jean-Marc Simon qui fut conseiller Afrique du ministre des Affaires étrangères sous la première cohabitation et directeur de cabinet de plusieurs ministres de la Coopération et ambassadeur en RCA, au Nigéria, au Gabon et en Côte d’Ivoire, est élevé, par la grâce de Nicolas Sarkozy, à la dignité d’ambassadeur de France.

L’influence de la Cour : un travers de la Françafrique au Quai d’Orsay

Que découvre-t-on à la lecture des documents publiés sur l’ingérence française dans le suivi du dossier ivoirien par la CPI ?23 Que du côté de La Haye et de Paris, c’est l’effervescence pour écarter durablement Laurent Gbagbo de la scène ivoirienne. Qu’écrit Stéphane Gompertz dans un courriel daté du 11 avril 2011 à plusieurs officiels français, au Quai et à l’Élysée, une diplomate française du nom de Béatrice Le Fraper du Hellen, très proche de l’ancien procureur (très sang bleu Quai d’Orsay) ? Ceci : « Un collaborateur français (du procureur) vient de m’appeler. Le procureur souhaite que Ouattara ne relâche pas Gb (pour Gbago) et qu’un État de la région renvoie au plus vite à la CPI au plus vite ». Notons que cette requête ne repose juridiquement sur rien : ni compétence juridique, ni mandat d’arrêt pour traduire devant la CPI Laurent Gbago pour crimes contre l’humanité. Nous sommes loin des critères d’indépendance et d’impartialité imposés par le statut de la Cour. On s’interroge sur le point de savoir si les diplomates français s’ingèrent dans les procédures de la CPI comme ils le feraient (ou ils le font) dans les procédures françaises avec les membres du parquet français. Ceci donne à réfléchir. Nous attendons avec impatience les suites qu’envisagent de donner le Quai d’Orsay (sur le plan disciplinaire) et le parquet (sur le plan pénal) à cette affaire sauf à ce que la déraison d’État ne conduise tout simplement à classer l’affaire sous quelques piles de dossier croustillants.

Pour mémoire, rappelons qui est Béatrice Le Fraper comme nous l’indique le site officiel de l’ambassade de France à Malte où elle occupe les fonctions d’ambassadeur depuis 2015 ? À tout le moins, nous devons convenir qu’elle est une experte reconnue et respectée des droits de l’homme.

« Née le 28 juin 1961, Son Excellence Madame Béatrice le Fraper du Hellen est titulaire du Diplôme de l’Institut d’études politiques. Conseiller des Affaires étrangères hors classe, elle est Chevalier de l’Ordre National du Mérite et Chevalier de la Légion d’honneur. Après un premier poste à l’Ambassade de France au Bénin, elle devient, en 1988, chargée des Droits de l’Homme à la Direction des Nations Unies et organisations internationales du Ministère des Affaires étrangères. Nommée en 1991 déléguée de la France à la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies à Genève, Béatrice le Fraper du Hellen préside notamment la Conférence portant adoption de la Déclaration de l’ONU sur la Protection des Personnes contre les Disparitions Forcées. A la Direction des Affaires juridiques du Ministère des Affaires étrangères de 1996 à 2000, elle est chargée des négociations du Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale et des stratégies d’arrestations de criminels de guerre. Conseiller à la Représentation permanente auprès du Conseil de l’Atlantique Nord à Bruxelles de 2000 à 2004, elle devient ensuite Sous Directrice des droits de l’Homme et des affaires humanitaires au Ministère des Affaires étrangères. En 2006 elle rejoint la Cour pénale internationale de La Haye en tant que Conseiller spécial du Procureur et Directrice de la coopération, chargée entre autres des arrestations de personnes poursuivies. En juin 2010, Madame le Fraper du Hellen est nommée Chef du pôle Droits de l’Homme et Conseillère juridique à la Mission permanente de la France auprès des Nations unies à New York. Le 8 janvier 2015, elle prend les fonctions d’Ambassadrice extraordinaire et plénipotentiaire de la République française auprès de la République de Malte »24.

Pour ce qui est de la suite de l’histoire, il n’y a rien à ajouter de plus si ce n’est que Laurent Gbagbo a bien été traîné devant la CPI et que le déroulement de la procédure démontre que le dossier du nouveau procureur tel qu’il existe en 2013 est trop faible pour pouvoir envisager un procès. Mais, l’intéressé n’est toujours pas libéré au titre de la présomption d’innocence, principe cardinal du droit français. Il est inculpé en 2014 pour crimes contre l’humanité en compagnie de Charles Blé Goudé. Sa santé est source de préoccupation. Quant aux crimes commis pendant la guerre par les troupes d’Alassane Ouattara et son actuel premier ministre, Guillaume Soro (800 civils massacrés dans l’ouest du pays), aucun mandat n’a, à ce jour, été émis par la CPI. Du bon usage de la justice à géométrie variable et du deux poids, deux mesures25.

La France devant la CPI : un nouvel usager ?

L’affaire Lafarge26 connaît de nouveaux développements avec la demande formulée par l’ONG Sherpa, partie civile dans l’enquête sur les activités du cimentier en Syrie, visant à entendre comme témoins l’ex-ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius et deux anciens ambassadeurs. Rappelons que le parquet a ouvert en octobre 2016 une enquête préliminaire sur la base d’une plainte de l’ancien ministre des Finances, Michel Sapin pour infraction au code des douanes. Pour ne pas être en reste, Sherpa estime « qu’il n’est pas question seulement de financement de terrorisme mais aussi partiellement de complicité de crime de guerre et de crime contre l’humanité »27. Rien de moins ! Des graves inconvénients de la diplomatie économique (concept aussi farfelu que dangereux car il doit arbitrer entre valeurs et intérêts) portée par Laurent Fabius telle le Saint-Sacrement qui pourrait lui revenir à la figure comme par effet boomerang ! Peut-être pourrait-il un jour devoir répondre de ses actes devant la CPI et reprendre la cellule occupée par Laurent Gbagbo, le jour où ce dernier sera libéré, faute de preuves irréfragables ?

« Il se passera du temps avant que la justice des hommes ait fait sa jonction avec la justice ». Quelle vérité dans cette réflexion de Victor Hugo ! Il en va tout autant pour la justice nationale que pour la justice internationale. Ni l’une, ni l’autre ne sont infaillibles. Sans parler des dérives inhérentes à une justice internationale qui joue le rôle de moulin à prières des droits de l’homme et d’encensoir du droit humanitaire. L’éthique n’est pas le droit. Elle est une manière d’éluder le droit qui devrait constituer son unique boussole28. Ce « CPIgate » tombe au plus mauvais moment pour une juridiction qui prête le flanc à la critique depuis sa création et dont le bilan est loin d’être convaincant pour le moment. Sophocle répond en partie à notre interrogation existentielle sur les vertus et les vices de la CPI lorsqu’il écrit : « Je n’ai que mépris pour le mortel qui se réchauffe avec des espérances creuses ».

D’un certain point de vue, le mantra de la paix par le droit qu’incarne en partie cette juridiction n’entre-t-il pas dans cette catégorie des « espérances creuses » ? Que dire de tous ces ministres, hauts fonctionnaires français qui, de compromis en compromissions, écornent l’éthique, voire le droit, en agissant comme s’ils étaient les représentants de Républiques bananières que nos plus hautes autorités n’ont de cesse de stigmatiser dans les enceintes internationales ? Quid de la moralisation de la vie publique, cap et boussole du quinquennat jupitérien ? Décidemment, rien ne va plus à la Cour pénale internationale.

Guillaume Berlat
16 octobre 2017
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