Justice: Patrick Ramaël dans les mailles de la justice française. Il est poursuivi pour incompétence par le Conseil supérieur de la magistrature

Publié le mercredi 1 février 2012 | IVOIREBUSINESS – Patrick Ramaël, juge français en charge de l’affaire Guy-André Kieffer, récolte-t-il les fruits de sa propension à mener de la façon la plus cavalière qui

Patrick Ramaël. A droite, Ben Barka.

Publié le mercredi 1 février 2012 | IVOIREBUSINESS – Patrick Ramaël, juge français en charge de l’affaire Guy-André Kieffer, récolte-t-il les fruits de sa propension à mener de la façon la plus cavalière qui

soit, les enquêtes dont il a la charge ?
Tout porte à le croire car le ministère de la Justice française a demandé au Conseil supérieur de la magistrature, de prononcer des sanctions contre le juge Patrick Ramaël qui, en plus de l’affaire André Kieffer, enquête sur l’affaire Ben Barka, et celle de deux randonneuses françaises en Argentine.
L’affaire Kieffer et celle des randonneuses françaises défraient actuellement la chronique en France.

Une décision pourtant rare. De 2006 à 2010, seulement vingt-quatre magistrats du siège et six du parquet ont connu pareille procédure, selon les chiffres du Conseil. On note également qu’en 2011, le ministre de la Justice française a poursuivi huit magistrats du siège et quatre du parquet, précise la chancellerie relayée par Le Parisien.

Né en 1957, titulaire d'une maîtrise en droit, il devient auditeur de justice en 1980.
Il est nommé juge d'instruction au tribunal de grande instance d'Avesnes-sur-Helpe en juillet 1982.
Il devient juge de l'application des peines en 1984.
Il est nommé juge d'instruction à Bordeaux en 1985.
Après avoir été placé provisoirement en disponibilité (mars-décembre 1987), il est nommé substitut du procureur de la République de Bordeaux puis devient procureur de la République de Cambrai en avril 1991.
Il est nommé substitut du procureur de la République de Paris en 1994.
Le 1er juillet 1995, il est détaché auprès du ministère des affaires étrangères pour occuper la fonction d'administrateur à la Commission européenne.

Il est reproché plusieurs « insuffisances professionnelles » à Patrick Ramaël.
La première concerne l’affaire Guy-André Kieffer sur les bords de la lagune Ebrié et fortement marquée par le squelette supposé être celui du journaliste Kieffer, découvert à Issia, mais qui après un test Adn négatif réalisé à Paris, a fait aller cette dernière tout droit dans le mur.
Les débats ont été relancés par la découverte d’un témoin clé « Gorge profonde », membre du commando-tueur du journaliste qui a affirmé que ce dernier a été enterré entre Abidjan et Sikensi, et non Issia.
Puis par la découverte d’un document classé SECRET-DEFENSE, mentionnant une opération dénommée SATANIC 2, d’assassinat de Kieffer pilotée par la DGSE avec l’aval de l’Elysée.
Toutes pistes que Ramaël rechigne à explorer.

La seconde concerne Alima Boumediene- Thiery. En conflit devant les prud’hommes avec son attachée parlementaire, la sénatrice n’a pas digéré que le juge, saisi par ses soins, ait qualifié ses poursuites d’« acharnement judiciaire ».
Troisème grief, les époux Levi, dont la plainte déposée en décembre 2002 ne sera finalement classée par la chambre de l’instruction qu’à la fin 2010, estiment que leur affaire a été traitée dans un«délai anormalement long ».
Quatrième motif : le garde des Sceaux reproche à Patrick Ramaël un « comportement inadapté à l’égard de sa hiérarchie ». En mars 2010, souligne-t-on, sommé de rendre des comptes sur l’activité de son cabinet, Patrick Ramaël s’était rebiffé. « Je déplore que l’intérêt que vous semblez porter au service de l’instruction ne se manifeste qu’à l’occasion de ce que vous estimez être des dysfonctionnements », avait-il répondu au président du tribunal. Un ton« lapidaire et polémique », selon le garde des Sceaux, qui y voit un manquement aux « devoirs de loyauté et de délicatesse » des magistrats. Quand d’autres regards pointent du nez le début des ennuis judiciaires de Ramaël ont commencé avec les mandats d’arrêt lancés contre de hauts dignitaires marocains, le jour même où Nicolas Sarkozy effectuait sa première visite de chef d’Etat au royaume chérifien, à la fin 2007. Une accusation rejetée du revers de la main par son avocat, Me Alexis Gublin. Parce que, se justifie-t-il, Patrick Ramaël est un juge « indépendant, un magistrat qui dérange ».

Catherine Balineau