France: Nicolas Sarkozy revient sous le signe du rassemblement

Par Le Figaro - Nicolas Sarkozy revient sous le signe du rassemblement.

Nicolas Sarkozy, mercredi à Paris. Crédits photo : TAAMALLAH / BESTIMAGE.

«Je suis candidat à la présidence de ma famille politique.» Telle est l'annonce, sobre, sans nommer pour autant son parti, qui marque le retour officiel de Nicolas Sarkozy dans la vie politique active, deux ans et demi après avoir perdu la présidentielle de 2012, et dix ans après avoir accédé une première fois à la présidence de l'UMP. Volontairement vague sur les modalités, il propose de donner naissance à «une formation politique du XXIe siècle (…), un vaste rassemblement sans aucun esprit partisan» qui pourrait voir le jour dans «les trois mois» qui suivront son élection à la tête du parti. Ce rassemblement est la grande idée de son retour, dont il veut installer l'évidence par-delà «les clivages traditionnels». Nicolas Sarkozy ne voudra pas, dans l'immédiat, annoncer un projet et une vision. Il espère avant tout recréer une dynamique de terrain sans heurter et provoquer. Pour y parvenir, il faudra qu'il prouve à son électorat qu'il n'a pas perdu la main, après tant d'années loin des réalités politiques: «Connaître deux fois l'état de grâce, en 2017 comme en 2007, cela n'a rien d'évident», avoue un proche.
Pour son retour, Nicolas Sarkozy a choisi de s'en tenir à un texte très général, mis en ligne sur son compte Facebook un peu après 16 heures. En plusieurs occasions, depuis mai 2012, il a utilisé le site pour s'adresser à ses «fans», réagir aux convocations judiciaires, répondre au jugement du Conseil constitutionnel sur le financement de sa campagne. Ce choix très réactif lui «permet de choisir le moment exact de sa publication, sans dépendre d'un organe de presse», commente un proche. Il a attendu l'après-midi et choisi de le publier malgré l'actualité des frappes aériennes de l'armée française en Irak, qui place François Hollande dans le rôle de chef des armées. Jeudi soir, Nicolas Sarkozy a vu brièvement un bout de la conférence de presse de son successeur après un aller-retour rapide en Suède pour participer à une conférence, et il a relevé «la faible audience» à la télévision.
«Nicolas a travaillé et retravaillé son texte pour qu'il n'y ait aucune polémique»
Laurent Wauquiez
La préparation de ce retour remonte avant l'été. Depuis, Nicolas Sarkozy et ses proches ajustent, corrigent, et jouent avec ce vrai faux suspense. Les ralliements successifs, les fuites sur la date et la manière d'annoncer son retour montrent que l'ancien président n'a rien perdu de son art de centrer l'attente autour d'une initiative considérée par ses proches comme «un secret de polichinelle». Le texte publié sur Facebook met fin à cette montée de l'attente et du désir chez ses aficionados, qui correspondait aussi à un temps d'analyse nécessaire. Car, on l'oublie un peu, le choix du moment lui a été imposé par les circonstances. L'affaire Bygmalion et le départ de Jean-François Copé de la présidence de l'UMP l'ont contraint à accélérer un retour qu'il n'envisageait pas avant 2015. Sa garde à vue et sa mise en examen, début juillet, n'ont fait qu'augmenter sa détermination, en provoquant sa première interview à la télévision. Mais, depuis, la fragilité de la gauche et l'ascension de Marine Le Pen dessinent un paysage politique cataclysmique. L'ex-président ne veut pas être accusé de créer par son retour des tensions supplémentaires. «Nicolas a travaillé et retravaillé son texte pour qu'il n'y ait aucune polémique», note Laurent Wauquiez, qui participait vendredi matin, avec Nathalie Kosciusko-Morizet, Christian Estrosi, Brice Hortefeux, son avocat Thierry Herzog et quelques autres à une réunion de travail. Il devrait aussi participer à un journal télévisé, dimanche soir.
Avec ce texte, Nicolas Sarkozy s'emploie à convaincre les Français que son retour est justifié alors qu'il avait annoncé un départ de la vie publique. «J'ai pris le temps de la réflexion après toutes ces années d'activités intenses»,explique-t-il. Il estime avoir désormais«le recul indispensable» pour analyser le déroulement de son mandat. Il affirme pourvoir «en tirer les leçons». Une façon d'accepter l'inventaire du quinquennat réclamé par nombre de responsables de l'UMP dans la première année. Il jure «écarter tout esprit de revanche ou d'affrontement», mais aussi «toute amertume». Ni la défaite - dont il estime qu'elle n'a rien eu d'humiliant -, ni les affaires, ni les querelles avec nombre d'anciens responsables de droite, dont son ancien premier ministre François Fillon, ne justifient un tel retour, jure-t-il.
Hors de question, explique-t-il, de «rester spectateur» du «délitement du débat politique», «de divisions si dérisoires au sein de l'opposition», car cela reviendrait à «une forme d'abandon». Nicolas Sarkozy parie que son retour sera la dernière digue contre la «marée inexorable du désarroi, du rejet et de la colère à l'endroit du pouvoir, de sa majorité mais plus largement de tout ce qui touche de près ou de loin à la politique».

Par Charles Jaigu