Débats et opinions: Les dirigeants africains et la phobie du respect de la loi

Par Correspondance particulière - Les dirigeants africains et la phobie du respect de la loi.

Joseph Kabila Kabange, Président de la République démocratique du Congo.

LES DIRIGEANTS AFRICAINS ET LA PHOBIE DU RESPECT DE LA LOI

A voir de près, le continent Africain ne devait pas avoir de problème par rapport aux textes ou lois que les différents pays qu’il regroupe se donnent eux-mêmes. Car l’Afrique continue d’être le continent où les chefs et les traditions sont respectés en dépit de « l’évolution » à l’occidentale. Le constat est une pilule qui plonge « le berceau de l’humanité » dans les ténèbres de la misère chaque jour.
Ici, notre intention est de discuter du bafouillage des textes que les Africains se donnent volontiers et des conséquences qui résultent de leur non-respect.

L’Etat est une entité abstraite dont le fonctionnement, résumons-le, est ainsi défini : Elire (1), Légiférer (2) et Agir (3). Pour Thomas Hobbes, l’Etat est un pacte d'association dans lequel le peuple menacé à tout instant et par tout le monde, échange sa liberté naturelle contre une protection dans la main d’un leader (voir Le Léviathan). Quant à Rousseau, l’Etat est un contrat social (1762). Ici encore, le désordre n’est pas permis. Chacun y perd de sa liberté naturelle qui lui permettait de faire à sa tête comme un peu dans le monde des animaux.

Nous pouvons ajouter que « L’Etat est une entité artificielle composée de fonctionnaires assujettis à un gouvernement et à ses règles ; c'est une personne morale souveraine, plus ou moins centralisé, qui impose des normes et organise la société. L’Etat dispose donc d’un grand pouvoir, toutefois limité par les textes dans un Etat de droit… » lemondepolitique.fr. Nous disons pour que « les fonctionnaires soient assujettis à un gouvernement et à ses règles », il faut que ces derniers qui, en majorité appartiennent à des partis politiques, respectent les règles fondamentales de leurs propres partis qui font leur promotion et les mettent à la tête de l’Etat. Sinon, comment peut-on respecter l’Etat lorsqu’on n’arrive même pas à observer ses propres lois ?

Certains Africains une fois à un certain niveau, se croient très suffisants et omniscients qu’ils font tout à leur tête. Ils en vacances les textes fondamentaux (constitutions) des Etats dont ils ont la destinée en main. En un mot, au su et au vu de leurs compagnons de lutte qui les ont mis sur le siège du leader, ils violent avec une indécence déconcertante, toutes les lois qu’ils prétendaient défendre hier. Que le pouvoir aveugle vraiment ! Ces messieurs et ces dames croient, mordicus, en leur seul aura qu’ils se comportent comme des sourds-muets. Ils refusent d’entendre raison face aux cris et aux mécontentements de leurs concitoyens qui les rappellent à l’ordre. Au contraire, ils voient leurs conseillers comme les ennemis qui les empêchaient de gravir les échelons de leur vie cachée qui consiste à « grimper sur les épaules des autres pour manger seuls les mangues mûres pendant que le peuple se contentent des marches », aime dire notre ami Guedegbe Gabelo. Dans ce cas précis, nous avons le cas très résonnant du leader du LIDER, Mamadou Koulibaly. Il se voyait, en son temps, comme celui qui faisait le Front Populaire Ivoirien (FPI). Il pensait, avec ses fanatiques bien entendu, que son départ lui offrirait le pouvoir sur un plateau doré et que ce même départ verrait la disparition du FPI. A ses propres dépens, il a appris que c’est le FPI qui l’a fait connaître. Une seule preuve, il a été copieusement battu à Koumassi où il gagnait pourtant les élections comme « l’Allemagne a battu le Brésil » sur son propre sol dans la dernière coupe du monde. Le Professeur Koulibaly gagnait de très loin son adversaire immédiat lorsqu’il était encore au FPI. Nous osons croire que les actuels dirigeants du FPI ne feront point la même bêtise. « Asseyons-nous et discutons », dit le Président de la République de Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo. Il faut, avec tous les moyens possibles, taire tout instinct de pouvoir immonde qui sent la trahison, de quelque leader que ce soit. Le FPI est bien structuré, respecter les textes évitera l’implosion au parti du Président Gbagbo. Il y’a beaucoup à faire. Il ne faut pas perdre de vue l’adversaire qui se refait chaque jour. Le leadership demande que l’on fasse preuve de plusieurs atouts tels que la modestie, l’écoute du peuple, etc. L’arrogance est le démon politique qui pousse à l’échec incurable. C’est l’arrogance face aux revendications des soldats qui a fait perdre le pouvoir à Henri Konan Bédié. C’est encore elle qui fera mordre la poussière à Mokossi Naba Allassane Dramane Ouattara dans les prochains jours. Il dit « oui » à une constitution tout en sachant qu’il ne la respectera jamais (celle de l’ère Robert Gueï). L’arrogance finira par trahir Kabila au Congo dit démocratique. Kabila détient Etienne Tshisekedi en prison depuis des mois sans problème.

Etienne Tshisekedi, le sphinx en campagne à Kinshasa. © REUTERS/David Lewis

L’arrogance a aussi rattrapé Nicolas Sarkozy qui se voyait comme l’incarnation de Louis XIV, en France. Hitler a été lui aussi une victime de son arrogance qui mettait tous les autres peuples sous les pieds des Nazis. Au Congo Brazzaville, Sir Denis Sassou Nguesso et ses collaborateurs du Parti Congolais du Travail (PCT) sont en train de mettre tout en œuvre pour changer toute la constitution de janvier 2002. Cette constitution donne droit à deux et seulement deux mandats présidentiels. Mais, avec les élections de 2016 en fond de toile, le président aux 112 comptes bancaires en France et son entourage soutiennent par la bouche du ministre Thierry Moungala que ladite constitution a accompli « son contexte historique » (sur RFI avec Alain Foccart). Cela voudra dire, par exemple que le point concernant deux mandats présidentiels seulement et celui de la fourchette d’âge (40-70) seront tout simplement balayés si les Congolais qui ne sont jusque-là pas consultés, ne se réveillent pas dès maintenant. Pour l’histoire, rappelons que Sir Sassou a trente (30) années de pouvoir présidentiel déjà derrière lui.

Blaise Compaoré se voit comme « le bras droit » de la France qui animalise les Africains. Il a trahi Thomas Sankara et il a foulé au pied la constitution burkinabée destinée à rendre le Burkinabé intègre. Il payera sûrement demain.

La navigation à vue plonge le continent dans des bouleversements incessants et meurtriers. Depuis la famille, le village, la ville et le département, l’Africain doit se donner des lois qu’il devra respecter ensuite. C’est le respect des textes, même si cela ne constitue pas une panacée en soi, qui créera ou conduira vers la consolidation de l’Etat en Afrique. Le respect de la loi rendra également solides et fiables les organisations sous régionales et continentales. Sinon, en rangs dispersés avanceront les Africains et heureux seront toujours les Occidentaux qui ne sont pas toujours les seuls assassins des Africains (le mal est parmi et en nous également).

Une contribution de SYLVAIN DE BOGOU