Burkina: Blaise Compaoré vient de déclarer la guerre à son peuple

Par legrigriinternational.com - Burkina. Blaise Compaoré vient de déclarer la guerre à son peuple / Bruno Jaffré

Dessin / Mil'Pat.

Tel est le titre de la réaction d’un internaute burkinabé sur sa page facebook dès que la nouvelle est tombée : le conseil des ministres a adopté un projet de loi portant révision de la Constitution. Il a été transmis à l’assemblée nationale pour être soumis au vote des députés, le jeudi 30 octobre prochain. C’est dire que le pouvoir est désormais pressé.

Deux modifications constitutionnelles sont proposées :

« Au lieu de:

Art.37. Le Président du Faso est élu pour cinq ans au suffrage universel direct, égal et secret. Il est rééligible une fois.

Désormais :

« Le Président du Faso est élu pour cinq ans au suffrage universel direct, égal et secret. Il est rééligible DEUX fois. »

Pour le second article concerné par la modification, le projet de loi propose:

Au lieu de:

Art. 165. Aucun projet ou proposition de révision de la Constitution n’est recevable lorsqu’il remet en cause :
– la nature et la forme républicaine de l’Etat ;
– le système multipartiste ;

- l’intégrité du territoire national. Aucune procédure de révision ne peut être engagée ni poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire.

Désormais:

Art. 165. Après la promulgation de la présente loi, aucun projet ou proposition de révision de la Constitution n’est recevable lorsqu’il remet en cause :

- la nature et la forme républicaine de l’Etat ;
– le système multipartiste ;

- la durée et/ou le nombre de renouvellement du mandat

- l’intégrité du territoire national. Aucune procédure de révision ne peut être engagée ni poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire. »

Toutes les manœuvres ont échoué

Bien, qu’ayant exercé le pouvoir depuis 27ans, cette modification permettrait donc à Blaise Compaoré de faire un nouveau mandat de 5 ans, mais impose à l’avenir l’impossibilité pour un autre président de dépasser 3 mandats. Une modification constitutionnelle, taillée sur mesure pour sa propre personne !

Ainsi donc après 3 ans de manœuvres en tout genre, médiations diverses, commissions de réforme des réformes politiques, tentative de dialogue vite avortée, le consensus n’a jamais pu être obtenu sur cette modification de l’article 37. Durant toute cette période, cette question avec celle de la mise en place du sénat ont paru être les seules préoccupations du monde politique. Mais elle cachait la vraie question qui préoccupe le pays, Blaise Compaoré va-t-il accepter de laisser le pouvoir ? La réponse est aujourd’hui clairement non.

Un pouvoir qui s’effiloche

Cet entêtement s’est inévitablement retourné contre lui. Car depuis, le monde politique et le monde associatif ont considérablement évolué. A tel point que l’assise du pouvoir s’est petit à petit rétrécie. De très nombreux anciens dirigeants du CDP, le Congrès pour la démocratie et le Progrès, le parti au pouvoir, suivis par de nombreux militants ont créé un nouveau parti, le MPP, le Mouvement du peuple pour le progrès. Et non des moindres, puisque parmi eux se trouvent Roch Marc Christian Kaboré, ancien président de l’assemblée nationale, secrétaire exécutif du CDP, et ex premier ministre, Simon Compaoré, ancien maire de Ouagadougou, et Salif Diallo, ancien ministre proche parmi les proches de Blaise Compaoré qualifié « l’homme de toutes les missions discrètes, sinon secrètes » par Jeune Afrique (http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAJA2550p032-034.xml1/).

Certes un Front républicain a été constitué par quelques partis pour soutenir le référendum, mais leurs dirigeants ont eu jusqu’ici un itinéraire tellement sinueux qu’ils sont souvent déconsidérés.

Par Bruno Jaffré